Le retour du lutin

J'avançais à tâtons, sur le radar comme disait mon père, quand j'ai heurté quelque chose. Que je heurte quelque chose, le lendemain d'un party, ce n'est pas étonnant. Mais le bruit de cette chose... Pourtant, Léo n'était pas tombé endormi sur mon plancher hier. Qu'est-ce qui avait pu faire ce bruit? J'ai renversé la tête d'un coup sec pour m'envoyer le toupet en arrière et dégager mes yeux quand je l'ai vue. Elle était là. Je l'ai prise dans mes bras et me suis mise à l'embrasser.

-Mon amour Calamité est revenue.
-J'amène le fusil!
-Non elle est toute seule. Tu es toute seule? Lui ai-je demandé.

Elle a baissé les yeux et m'a pointé le sol alors je l'y ai déposé. Elle s'est mise à faire des gestes, elle est allée chercher un crayon et m'a fait un dessin.

Je ne suis pas certaine d'avoir tout compris. Elle n'a plus son bébé, elle a accouché, ils l'ont pris. Dans son monde, pays ou je ne sais quoi, les choses se dérouleraient ainsi. Le fait qu'elle ait accouché d'un enfant ne justifie pas qu'elle l'élève. Elle s'est enfuie et est venue nous rejoindre. Elle semble croire qu'ils ne reviendront pas la chercher puisque nous avons été bannis. Les lutins n'ont plus le droit de mettre les pieds ici alors...

Elle regardait tout autour d'elle, l'air découragé.

-Je sais c'est le chaos. C'était la fête de Mélo hier.
-Mélo!

Ah que je me suis ennuyée d'elle, de sa petite voix. Elle a frotté le plancher, elle a retrouvé mon briquet. Moi qui pensais passer la journée à torcher, j'ai eu le temps de me vernir les ongles d'orteils.

Elle avait l'air déçu quand elle a ouvert son tiroir et qu'elle a constaté qu'il était plein.

-Je ne pouvais pas savoir que tu reviendrais.

Nous l'avons vidé ensemble. La nostalgique que je suis a gardé soigneusement les vêtements achetés pour mon petit lutin. Elle dort à poings fermés dans sa petite jaquette de coton. Demain soir, je vais lui brosser les cheveux en regardant Dallas.