vendredi 6 septembre 2013

J'ai vu un petit garçon courir à toutes jambes pour rattraper un clown afin de lui donner un cadeau, un porte-clé jaune. J'ai ravalé un sanglot et je me suis dit que la journée serait longue si je partais à pleurer chaque fois que je vois de quoi de cute.

La morphine ça fait pleurer. J'en ai pas pris tant que ça. C'est plus comme des larmes qui viennent des ovaires. Comme quand le juge te dit que finalement les vrais parents se sont pris en main, t'es inutile et vide. Ça le traumatiserait de garder le contact avec toi.

Ça m'a pincé quand j'ai vu cette petite fille d'à peine cinq ans danser. Elle tenait sa jupe pour la faire voler. Elle tournait sur elle-même. Elle rêvait d'un garçon qui danserait avec elle. J'étais comme ça. Quand elle a vu son ami et lui a pris la main, il l'a repoussée. J'ai eu de la peine pour elle. Elle a continué à danser toute seule avec son cavalier invisible. Un petit prince charmant imaginaire qui l'invite à danser. J'étais comme ça.

Un kiosque pour des écoles saines. Comment ça se fait que les écoles sont pas déjà en train de se construire? Pourquoi c'est si long? De quoi vous avez besoin? La maman, elle me dit qu'un jour, le docteur Julien lui a expliqué comment son fils absorbait son stress et son angoisse à elle. Elle pense que les parents auraient besoin de soutien.

Je les ai vus toute ma vie sur la Tario. Ce couple. Depuis que je suis jeune. Elle a l'air un peu nouille. Pas jolie. Édentée, cheveux grichous. Lui a l'air d'une brute, un regard d'enragé. C'était la première fois qu'on discutait.

-Je peux vous en parler moi, j'étais bibliothécaire à cette école-là. C'était bénévole parce que sinon y allait fermer la bibliothèque.
-Moi mon gars s'en est pas remis, je l'ai envoyé dans une école privée à Rosemont. Là, il va bien.
-Une école privée, vous dites?
-Pas le choix, si je veux pas qu'il finisse comme moi. J'ai rien, j'ai rien que mes enfants. Je veux que mes enfants se débrouillent, asteur ça prend de l'éducation.
-Monsieur, la pantère sur votre bras. Est-ce que c'est Normand Demers qui l'a faite?
-Ma petite fille, tous mes tattoos sont faits par Normand Demers. Comment tu le connais?
-Le père d'un ami.

Une autre femme à qui il manque des dents. La jeune fille qui l'accompagne, on dirait qu'elle a quatorze ans. Elle a un air timide, des taches de rousseur partout.

-Je fête les dix-huit ans de ma fille à soir, au 281. Après on va au Bingo, un Bingo de nuit. Je veux essayer de lui faire gagner quelque chose. J't'assez fière de ma belle grande fille. On va la mettre belle, lui remonter ça pis ça.

Elle lui pogne les boules, lui tape le cul. La petit est gênée. Elle est tellement jolie et parfaite comme ça. Comment ça se fait qu'elle ne fête pas avec ses amis?

J'ai pleuré en rentrant, j'ai pleuré longtemps chez moi. J'arrête pas de pleurer. C'est les hormones.

J'ai jamais vu du monde aimer ses enfants (tout croche), mais les aimer autant. Ça existe pas ailleurs en Amérique du Nord. Y a juste dans Hochelaga que tu vas rencontrer des gens sur l'aide sociale qui vendent des canettes pour envoyer leur garçon à l'école privée.

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