mardi 20 mars 2012

Mon grand-père Gérard contre la hausse

Il n'a jamais fumé mais il est mort pareil du cancer à cause de la fumée secondaire. Il a grandi sur la rue St-Timothée entre les Cotroni pis les Vendetti, mais lui, venait d'une famille d'artistes. Il était tout le temps après son piano. Il chantait le soir au Coronet au coin de la rue Craig. Il chantait ça. Des tounes de manufacture pour un peuple d'ouvriers. Il achetait ses chemises chez Dupuis frères. Le mardi, il rapportait du DaGiovanni pour toute la rue. C'est comme ça que j'ai rencontré Redge. Son grand-père pis mon grand-père faisaient des mauvais coups dans le redlight depuis toujours. En plus on avait des noms qui finissent en i et on aimait Michael Jackson. Aujourd'hui il m'a donné un thé qui sent l'orange julep.

On s'est rappelé notre première manif ensemble, on avait neuf ans. Nos mères étaient dans le Comité Social Centre-Sud. Le spectacle était mauvais au centre Bell. Il manquait des trucs. Comme si un camion n'était pas arrivé à temps. Bubble. L'arbre de Neverland, le robot dans la montgolfière. Le show était tellement cheap que j'étais gênée d'avoir donné à Redge le billet du gars qui paie la moitié du loyer. On parlait de comment on planifiait de cacher des armes. Repartir le FLQ, lui et moi quand on avait seize ans. Finir la job de nos pères. On a parlé de comment on en a plein le cul des esties de BS payés quarante mille par année qui comprennent pas qu'on se bat pour eux et leurs enfants. Les tabarnaks de polices, les sacrements de concierges, les caissières syndiquées, les maudites vaches de serveuses. Ceux qui voudraient ne voir personne devenir docteur sauf les fils de docteurs. Gérants d'estrade qui mâchent leur cure-dent et commentent en écoutant TVA comme si c'était une source d'information. Ceux qui ne prennent même pas le pont une fois par année pis qui trouvent le moyen de chiâler.

On s'est dit qu'on ne rentrerait jamais à la manufacture. On n'a rien à perdre nous autres. C'est se battre pour étudier ou retourner dans la rue. La rue ou la rue.

1 commentaire:

  1. Les maudites vaches de serveuses et les gérants d'estrade. Bien mordant. J'aime.

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