jeudi 25 février 2010

Tu ne viens pas d'ici

Je l'ai vu tout de suite, j'ai un radar pour détecter les émigrants. T'as pas d'accent, la peau de même couleur que moi, mais tu n'es pas d'ici. Retourne donc d'où tu viens, c'est pas le plateau ici, tu t'es trompé. Déguerpis avant qu'il t'arrive de quoi de plate, t'as pas ce qu'il faut pour survivre ici mon chum.

Tu es certainement d'un endroit où toutes les maisons se ressemblent, t'as eu un papa et une maman parfaits, que tu pouvais détester à loisir, les bébés gâtés n'ont pas d'autres raisons de se révolter. Tu avais ta chambre à toi tout seul et la dernière console. Tu trouves ça gênant de vendre des bouteilles vides. Tu les mets dans le bac à recyclage et tu sors en gueulant après celui qui vient les chercher dans ton bac pour se payer à manger.

Tu es venu à Montréal parce que tu cherchais quelque chose de laid qui te ressemble mais tu le trouveras pas, parce que t'es pas vrai et t'es trop laid, beaucoup trop laid.

Toi t'es pas allé à l'école avec des ti-culs qui ont le ventre vide, des chaussures dépareillées et les yeux gris de rêves assassinés. C'est sans doutes pourquoi tu méprises les adultes qu'ils sont devenus.

Ton désespoir c'est un jeu, une mise en scène de faux artiste. Tu penses que tu es pauvre, parce que tu ne peux pas te payer une bière ce soir. Tu as trente ans et ta mère t'envoie de la sauce à spag en attendant que ça marche. Ça ne marchera jamais, va donc travailler chez Mcdo.

Ici, on apprend à se débrouiller au berceau. Ici, on sait manger pendant une semaine avec quinze dollars. Ici, on commence à travailler au noir avant de savoir écrire et on donne sa paye à sa mère pour l'aider. Mais toi, tout ce que tu vois c'est des épais qui manquent de vocabulaire. Tu aurais tant à apprendre de la fille laide qui suce pour pas cher en bas de chez toi, mais tu te câlisses d'elle au point de refuser de la payer. Comme si sucer ta p'tite queue molle et sale était une faveur que tu lui faisais.

Et si tu avais raison, si on avait tous ce qu'on mérite dans la vie. J'te jure que t'aurais pas grand chose. Moi, je t'enlèverais tout pour que t'arrêtes de jouer et saches enfin ce que c'est, mais ça te tuerais. Ceux que tu prends pour des faibles et des perdants sont bien plus forts que tu ne le seras jamais. T'es comme un gros chat de maison qui n'a jamais eu à attraper un oiseau de sa vie. Tu n'aimes que ceux qui te flattent et te bourrent le cul parce que t'as un coup de griffe extraordinaire. Moi je ne t'aime pas.

Tu n'es pas d'ici et tu devrais repartir, tu gâches la photo, tu ne seras jamais d'ici. Disparais avant que je sorte ma hache.

5 commentaires:

  1. ...Fuck...

    Troublant...

    Je ne mets pas le chapeau, mais criss, je pense que je l'ai déjà regardé...

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  2. Ça fait du bien. Encore une belle lecture.

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  3. Ouf... j'aimerais pas que tu me considère comme un intrus!

    Ça me rappelle qu'il me reste 12 piasses pour bouffer jusqu'à lundi...

    KRAFT DINNER TIME!

    Excellent billet encore une fois.

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  4. Je sais exactement de qui tu parles Cannelle...Tu y a pas envoyé dire :)

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  5. @ LeDZ : C'est un chapeau ben laid. J'suis sûr qu'il ne t'irait pas mais essaye le pas d'un coup qu'il reste pris.

    Maintenant, je t'avoue que y a quelque chose dans ta série les voisins, qui a brisé mon petit coeur de fuckée. Mais ça c'est mon problème hein. ;)

    @ Dominique : Je sais juste que ça a fait du bien de l'écrire.

    @ Patrick Duval : Ben là plains-toé pas, 12 piasses pour quatres jours calvasse, t'es un estie d'plein! À ce prix là gâte-toé pis rajoute de la saucisse dans ton macaroni! ;)

    Venant de toi, ça me touche, merci. :)

    @ Mistigri : Tu connais ça toi, les chats de maison, hein mon matou?! ;)

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