jeudi 8 juillet 2010

Ça pourrait vous arriver

Ça commence quand ton père trouble ton sommeil profond d'enfant avec son pénis sale à sucer. Ça continue avec ta mère qui refuse de te croire. Ta mère qui te répète que t'es tellement laide que tu devrais te cacher. Ton seul ami qui crève dans tes bras parce qu'un chien, ça ne vit pas assez longtemps. Tu meurs un peu chaque fois que tu te sens jugée, quand t'entends des rires, t'es persuadée qu'on rit de toi, ce ne peut être que toi. On t'a mis sur la terre pour se marrer, tu n'es qu'un rat dans un labyrinthe sans issue. T'aimerais répondre quelque chose d'intelligent, mais t'es pas intelligente, t'as d'autres qualités, mais pas ça.

Les salauds, les avortements et les souris qui viennent chier dans ton tiroir de bas. Ça n'arrête pas, tu te dis que c'est fini là, ça ne peut pas être pire. Mais ça peut toujours être pire. La vie, c'est fait pour souffrir son soixante ans, c'est ça que tu te dis. Le propriétaire qui veut son loyer, tes amis veulent que tu rembourses les vingt dollars empruntés. Tu sais pas quoi faire, t'es épuisée, tu cours tout le temps, tu mens, t'inventes un plus gros mensonge pour couvrir le précédent. Hostie que ça pue chez vous. Ça te tente pus de te laver. Même quand t'es propre, même quand tu te maquilles, pas moyen d'avoir du bon cul.

Tu remontes tout à coup. C'est dans l'air, le printemps, tu souris au miroir et tu demandes à une amie de te couper les cheveux. Tu te trouves une job à vingt piastres de l'heure, autour de toi, les gens sont jaloux, toujours les mêmes qui ont toute câlisse! Comme si tu méritais de vivre dans marde jusqu'à la fin de tes jours. Comme si ces tabarnaks de caves prématurés gâtés à l'os étaient en mesure d'en juger. Tu payes le party tous les soirs, l'argent c'est fait pour être dépensé, t'en as jamais eu, tu ne comprends même pas ce qu'économie signifie. Tu payes même pour ceux que t'aimes pas, c'est des restants de tradition judéo-chrétienne comme ton vieux chandail troué que tu ne te vois pas jeter. Ne pas faire aux autres ce qu'on ne voudrait pas se faire faire. Venez et commandez ce que vous voulez, c'est moi qui paye. Tu as une nouvelle carte de crédit, tu as un compte en banque, tu achètes de la nourriture qui moisie dans le frigo et tu en jettes des sacs pleins, pas grave, tu en achèteras d'autre.

Et puis arrive encore une merde, tu tombes. Ça fait mal, la douleur on l'oublie si vite, on ne se souvient jamais bien de la douleur. Quand elle te prend, tu te dis, coudonc sacrement, je me souvenais pas que ça faisait mal de même. T'avais pas grand chose, mais tu te trouvais confortable, c'est fini, déjà. Réveille la grande tu pensais quand même pas que ça allait durer? Pauvre folle, c'est pas pour toé le bonheur, vas-tu comprendre? Obstine-toé pas pis lâche prise. T'as pas d'énergie à perdre à espérer pour rien. Faut s'y faire. Un jour à la fois. Les nuits sans sommeil, les semaines d'angoisse et le temps qui s'étire comme du spaghetti en canne.

Et l'autre vache qui ne comprend rien, qui dit que t'as juste à te fouetter et que tout est possible, Céline Dion était laide et pauvre, regarde ce qu'elle est devenue. L'autre vache, tu lui souris et fais semblant de la croire, parce qu'elle ne peut pas comprendre, c'est pas donné à tout le monde, l'empathie, la compassion, elle est si pauvre cette vache aux lunettes D&G, bronzage intégral et dents trop blanches. Tu souhaites quand même qu'un jour elle comprenne. À force de congeler ses restes dans des vieux plats de margarine et de les réchauffer au micro-onde, elle finira bien par choper un cancer, son chum prendra la fuite suite à la mastectomie, elle se retrouvera sur le BS après ses quinze semaines de prestations spéciales d'assurance emploi de maladie et un jour, oui un jour, tu la verras arriver sur ton coin de rue et tu lui diras décâlisse! C'est moé qui travaille icitte. Va vendre ton cul plus loin.

7 commentaires:

  1. Tu approches doucement le canon de la tempe, puis, à bout portant, BANG!

    Stie que j'aime ça. Ça réveille pas à peu près ça là.

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  2. Et dans la catégorie RAGE-SALE-QUI-DOIT-SORTIR-QUE-ÇA-PLAISE-OU-NON, la gagnante est : Freaking Cannelle !!!!!!!!
    Round of aplause !!!
    Standing ovation !!!!!
    xxx

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  3. T'as une façon d'écrire qui dérange mais que j'aime tout à la fois... go get it!

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  4. OOooooooohhhhhhhh!!!! WoW!!!!

    Crisse de vie sale, hein? On souffre jamais assez au goût des autres. Nos lunettes se cassent et c'est pire que le génocide du Rwanda.

    Merveilleux texte sur le manque de sympathie/empathie. J'ai eu envie de sortir pis de buter tout l'monde après l'avoir lu.

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  5. @ Sophia : J'pourrais te dire que j't'aime, mais tu l'sais déjà!

    @ Tattoo : Oui, à bout portant, c'est que je vise mal tu vois...

    @ La Shirley : Freaking Cannelle, on m'a dit plein d'affaires mais ça, c'est tellement gentil.

    @ Demijour : Merci, merci.

    @ Âme tourmentée : Merci à toi. xxx

    @ Luc Pierre : Ouais! On y va ensemble? J'ai une hache de trop.

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