jeudi 3 janvier 2013

Je viens de prendre ton message

Tu étais saoule.
Ça va très mal.
N'importe quoi d'autre c'est cool.
Pcp, lsd, poudre, E, speed, tu gères bien ça.
Pas l'alcool. C'est génétique.
Tu me souhaites bonne année.
Tu veux me voir pour me la montrer.
Je l'ai vue en photo avec tes petits yeux d'innus.
J'ai peur de ta voix.
Celle que tu as quand tu veux te sauver de toi.
Et tu ne sais plus comment.
Ni vers qui te tourner.

La grande panique.
Je sais comment c'est arrivé, tu me l'as dit.
Pas besoin de mentir avec moi.
Tu buvais et tu frappais.
Je ne te juge pas, tu le sais.
Après deux semaines de galère,
saoule,
fourrée par des clients qui ne te paient même pas
parce que t'es trop partie pour t'obstiner.
Quand t'as eu fini de boire, sniffer et fumer ton chèque de bs
et tes cadeaux de Noël à la place de payer ton loyer,
tu as vu, ton bébé, dans son lit.
C'était le jour de mon anniversaire. Dans quatre jours.
Tu as habillé ton poupon et tu l'a remis
à une travailleuse sociale.
Et tu as arrêté de boire.
C'est un grand garçon aujourd'hui.
Tu ne l'as jamais revu.
Tu l'imagines heureux et normal, puisqu'il est loin de toi.

Tu n'étais pas certaine de le garder
avec toi.
Parce que l'avortement, dans ta culture, ça marche juste pas.
Tu peux pas briser le cycle de la vie, t'es faite de même.
Quand tu te fais avorter, ça prend trois ans t'en remettre.
Tu ne t'en remets jamais complètement.
Ça te fait tout plein de cicatrices, tu ne les comptes plus.
Tes enfants.
Tu voulais le donner, tu es une fille généreuse.
L'envoyer chez toi, loin au nord.
Puis un jour tu m'as demandé avec ton grand sourire,
le veux-tu?
Comme si c'était ton restant de dessert.
Et ma main sur ton ventre.
J'ai dit non merci.
Tu as insisté;
tu sais en tant que mère, je peux décider où va mon enfant.
Mais moi, je le sais comment c'est dur à gérer, un p'tit
qui souffre d'alcoolisme foetal et de manque de coke.
J'avais pas d'énergie.
Et lui veut un enfant parfait, à son image. Le sien.
Et ton grand salaud est revenu et vous êtes tombés amoureux du bébé.
Mais là, tu es fatiguée.

Alors j'ai peur de rappeler.
De t'inviter à prendre un café.
J'ai peur de tes larmes, de ton désespoir
et du sourire de ta fille.
Peur que tu me la mettes dans les bras et que tu te pousses.
Parce que c'est ça que je veux.

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