vendredi 6 juillet 2012

Bonne fête papa

Je me suis réveillée avec le goût du sang dans la bouche. J'ai douze ans. La sensation de ton poing, de ta grosse bague enfoncée dans ma joue. Souvenirs de tes pas effrayants qui me réveillent, ta main sur la poignée de porte, ton odeur dans mon lit. Je suis allée vomir, j'ai pris mes courriels et j'ai remarqué la date. Je ne voulais pas penser à toi aujourd'hui, je n'y pensais pas hier, avant hier et tous les autres jours. C'est inconscient la mémoire. C'est ta fête.

J'ai fait du pain doré ce matin et ça m'a fait penser à Ti-cul, à la fois où tu m'a cassé deux doigts parce que je lui avais fait du pain doré pour souper.  

-C'est pas un souper, c'est un déjeuner ça! Christ de grosse truie, sacrament d'épaisse. Fais d'autre chose.
-Non.

Je voulais juste lui faire plaisir. Ti-cul aimait ça le pain doré pis moi, j'aimais Ti-cul comme si c'était le mien, je m'en occupais comme si c'était le mien. Mais j'aurais été mieux de faire du steak haché avec du jus de tomate pis des patates pour que tu m'aimes.

On pourrait penser que c'était un coup de tête, un geste irréfléchi, quelque chose que tu regretterais, mais tu savais ce que tu faisais. J'ai défié ton autorité et je persistais en te regardant dans les yeux et en souriant pendant que tu m'engueulais. Tu as choisi les doigts de ma main droite. Pour m'empêcher d'écrire. C'est la pire chose que tu m'aies faite et je me suis jurée que je n'arrêterais jamais d'écrire. Parce que ça t'échappait complètement, l'écriture te terrorisait. C'est moi et je n'ai pas besoin que tu m'aimes. Merci pour tout.

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