mardi 9 juin 2009

Février

Anne-Marie est frêle. La plus petite et la plus délicate de sa classe. À la récrée, ses amies l'encerclent pour la réchauffer. Anne-Marie grelotte sous ce manteau trop mince. Le froid la mord, le vent s'infiltre et la fouette. Ce vieux manteau, usé, ayant jadis servi à plus de cinq autres membres de la famille. Le manteau décoloré, déchiré, décousu, rapiécé, raccommodé. Elle doit le porter, parce qu'elle n'a que celui-ci. Comme elle doit porter la honte de n'être que ce qu'elle est.

Anne-Marie n'est pas très belle, ne sent pas très bon, n'est pas très intelligente. Anne-Marie n'a rien. Elle fait tant pitié que même les petits caïds de la cour d'école lui fichent la paix.

Aujourd'hui, l'enseignante a fait un cadeau à Anne-Marie. Elle lui a demandé de rester après les cours et lui a offert un beau manteau tout neuf... Presque. Sa fille l'avait porté quelques fois et n'en voulait plus. Anne-Marie s'est mise à pleurer. Un manteau presque neuf, juste pour elle. Elle est rentrée chez elle en flânant. Son manteau est chaud, il sent l'assouplisseur, il est à la mode.

-Maman! Regarde Maman! Mon prof m'a donné un manteau.
-Y est ben trop grand pour toé ce manteau là. Y me ferait ben mieux qu'à toé. Demain tu vas mettre un gros coton ouaté pour aller à l'école pis tu vas dire à ta maitresse qu'a t'redonne ton vieux manteau.

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